Satoshi Saïkusa

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Satoshi Saïkusa est un artiste Japonais, apprécié pour ses compositions méticuleusement travaillées et mises en lumière, Satoshi Saïkusa règle chaque prise de vue dans le moindre détail à la manière du metteur en scène cherchant l’instant parfait. Depuis une dizaine d’années, l’artiste se consacra à divers projets dans lesquels la nuit, la mémoire et la fragilité de l’existence reviennent de manière récurrente, nous éclairant sur ses propres préoccupations. A travers ses natures mortes, portraits d’artistes ou de yakusas, ou même ses nus, le concept bouddhiste d’impermanence de l’être semble engager un dialogue incessant avec celui de memento‐mori.

« La photographie est un art à la fois de vie et de mort. Ce que la photographie capture c’est la vie à un moment donné, mais ce qu’elle implique toujours c’est la mort de son sujet. Si la personne figurant sur la photo n’est pas décédée, il ou elle le sera éventuellement un jour. La mort en tant que fait, ou son irrémédiabilité, participe en partie au pouvoir magnétique de la photographie. Une photographie marquante ne nous hante pas seulement grâce à sa composition, sa lumière, ou son contenu, mais aussi à cause cette tension entre la mortalité de ce qui a été capturé dans l’image – une personne, une fleur – et l’immortalité de cette image. (...) Dans ses œuvres, Saïkusa traduit cette tension entre vie et mort, beauté et décadence, artifice et réalité. La nature morte (en français), ou still life (en anglais), est un de ses domaines de prédilection. La différence d’appellation donnée au genre dans les deux langues souligne combien la vie et la mort sont impliquées dans la représentation d’un sujet ou un objet, beau ou mémorable.

D'une part, nous avons le thème des fleurs et des pétales, qui incarne évidemment la beauté évanescente qui meurt sous nos yeux dans nos vases et sur nos tables. Les papillons qui sont épinglés ici et là dans nombre des œuvres de Saïkusa évoquent également cette évanescence. Il y a d'abord l'émergence de la chenille disgracieuse, une vie brève de beauté, puis la mort - à moins que le papillon ne soit préservé par l'entomologiste ou l'artiste et épinglé dans sa boîte, devenant une œuvre d'art miniature. D'autre part, nous avons le thème du crâne humain, obstiné et durable. Le crâne et les os sont les derniers vestiges que nous laissons derrière nous. Le crâne est le point commun de nos existences, derrière l'artifice inégal de nos corps et de nos apparences. Le crâne suggère l’indispensable humilité, parce que nos vanités mondaines seront toutes réduites à cela. Mais puisque même le crâne devient un sujet pour l'art, surtout quand il est poli et lustré, alors la mort aussi peut devenir un art. Et, réduits à nos crânes, nous sommes tous beaux, morbides et anonymes, les uns autant que les autres. »

Par Viet Thanh Nguyen


Satoshi Saikusa is a Japanese artist, his artistic practice is characterized by meticulous compositions, carefully planned and adjusted like filmmakers seeking for the perfect moment. During the last decade, he has developed personal projects in which the themes of night, memory and the fragility of being appear recurrently. Whether he works on series of nudes, of still lives or portraits of artists, dancers, yakuzas, the Buddhist concept of impermanence seems to dialogue incessantly with that of memento mori.

“Photography is the art of both life and death. What the photograph captures is a life in one still moment, but what the photograph always implies is the death of its subject. If the person in the photograph has not died, he or she eventually will. The fact of death, or the inevitability of death, is part of what gives photography its magnetic power. A remarkable photograph haunts us not only because of its composition, or lighting, or content, but also because of the tension between the mortality of what has been captured in the photograph—a person, a flower—and the immortality of the photograph. (...) In his artwork, Saïkusa translates this tension between life and death, beauty and decay, artifice and reality. The still life (in English), or nature morte (in French), are preoccupations for Saïkusa. The different names of the genre in two languages signal how life and death are both involved in the staging of the beautiful or memorable subject, or object.

On the one hand, we have the theme of flowers and petals, themselves clearly the embodiment of an evanescent beauty which dies before our eyes in our vases and on our tables. The butterflies which are pinned here and there throughout Saïkusa’s work also evoke this evanescence. First there is the emergence from the ungainly caterpillar, the brief life of beauty, and then death—unless the butterfly is preserved by the entomologist or the artist and pinned to a display, becoming a miniature work of art. On the other hand, we have the theme of the human skull, obdurate and enduring. The skull, and our bones, are the last vestiges we leave behind. The skull is the mute, common fact of our existence, behind the unequal artifice of our bodies and our images. The skull suggests the need for humility, because our worldly vanities will all be reduced to this. But since even the skull becomes a matter of art, especially when it is polished and buffed, then death too can become art. And, reduced to our skulls, each of us is just as beautiful, as morbid, and as anonymous as the other.”

By Viet Thanh Nguyen